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Séquence 4 Etude de texte Antigone

Module3 : Etudier une tragédie moderne « Antigone » de Jean Anouilh.

Séquence 4 : Le coup de théâtre.

Niveau : 1ère année bac.

Activité : Etude de texte.

Compétence : Etudier le coup de théâtre d’une tragédie.

Capacités : Lire et comprendre un événement imprévu la tragédie « Antigone ».

Objectif : Saisir le drame de l’héroïne  Antigone .

Support : «Voilà Hémon. Laisse-nous, nourrice…  C’est fini pour Hémon, Antigone ».

  • Mise en situation

Que signifie l’expression coup de théâtre ?

Tout d’abord, cette expression est justement employée au théâtre pour qualifier une action soudaine et inattendue dans une pièce de théâtre, et qui en relance l’intrigue. Cet effet a aussi pour but de susciter la curiosité et l’intérêt du public : lecteurs et spectateurs

Un coup de théâtre est un évènement qui survient de manière imprévue et brutale.

  • Texte

 

ANTIGONE : Non, nounou. (Hémon paraît). Voilà Hémon. Laisse-nous, nourrice. Et n’oublie pas ce que tu m’as juré.                      La nourrice sort.

ANTIGONE : (court à Hémon). Pardon, Hémon, pour notre dispute d’hier soir et pour tout. C’est moi qui avais tort. Je te prie de me pardonner.

HEMON : Tu sais bien que je t’avais pardonné, à peine avais-tu claqué la porte. Ton parfum était encore là et je t’avais déjà pardonné. (Il la tient dans ses bras, il sourit, il la regarde.) A qui lavais-tu volé, ce parfum?

ANTIGONE : A Ismène.

HEMON : Et le rouge à lèvres, la poudre, la belle robe?

ANTIGONE : Aussi

HEMON : En quel honneur tétais-tu faite si belle?

ANTIGONE : Je te le dirai. (Elle se serre contre lui un peu plus fort) Oh! mon chéri, comme j’ai été bête! Tout un soir gaspillé. Un beau soir.

HEMON : Nous aurons d’autres soirs, Antigone.

ANTIGONE : Peut-être pas.

HEMON : Et d’autres disputes aussi. C’est plein de disputes, un bonheur.

ANTIGONE : Un bonheur, oui… Ecoute, Hémon.

HEMON : Oui

ANTIGONE : Ne ris pas ce matin. Sois grave.

HEMON : Je suis grave.

ANTIGONE : Et serre-moi. Plus fort que tu ne mas jamais serrée. Que toute ta force s’imprime dans moi.

HEMON : Là. De toute ma force.

ANTIGONE : ( dans un souffle). C’est bon. (Ils restent un instant sans rien dire, puis elle commence doucement.) Ecoute, Hémon.

HEMON : Oui.

ANTIGONE : Je voulais te dire ce matin… Le petit garçon que nous aurions eu tous les deux…

HEMON : Oui.

ANTIGONE : Tu sais, je l’aurais bien défendu contre tout.

HEMON : Oui, Antigone.

ANTIGONE : Oh! Je l’aurais serré si fort qu’il n’aurait jamais eu peur, je te le jure. Ni du soir qui vient, ni de l’angoisse du plein soleil immobile, ni des ombres… Notre petit garçon, Hémon! Il aurait eu une maman toute petite et mal peignée mais plus sûre que toutes les vraies mères du monde avec leurs vraies poitrines et leurs grands tabliers. Tu le crois, n’est-ce pas?

HEMON : Oui, mon amour.

ANTIGONE : Et tu crois aussi, n’est-ce pas, que toi, tu aurais eu une vraie femme?

HEMON : ( la tient). J’ai une vraie femme.

ANTIGONE : ( crie soudain, blottie contre lu)i. Oh! tu m’aimais, Hémon, tu m’aimais, tu en es bien sûr, ce soir-là?

HEMON :  (la berce doucement). Quel soir?

ANTIGONE : Tu es bien sûr qu’à ce bal où tu es venu me chercher dans mon coin, tu ne t’es pas trompé de jeune fille? Tu es sûr que tu n’as jamais regretté depuis, jamais pensé, même tout au fond de toi, même une fois, que tu aurais plutôt dû demander Ismène?

HEMON : Idiote!

ANTIGONE : Tu m’aimes, n’est-ce pas? Tu m’aimes comme une femme? Tes bras qui me serrent ne mentent pas? Tes grandes mains posées sur mon dos ne mentent pas, ni ton odeur, ni ce bon chaud, ni cette grande confiance qui m’inonde quand j’ai la tête au creux de ton cou?

HEMON : Oui, Antigone, je t’aime comme une femme.

ANTIGONE : Je suis noire et maigre. Ismène est rose et dorée comme un fruit.

HEMON : ( murmure). Antigone…

ANTIGONE : Oh! Je suis toute rouge de honte. Mais il faut que je sache ce matin. Dis la vérité. Je t’en prie. Quand tu penses que je serai à toi, est-ce que tu sens au milieu de toi comme un grand trou qui se creuse, comme quelque chose qui meurt?

HEMON : Oui, Antigone.

ANTIGONE : ( dans un souffle, après un temps). Moi, je sens comme cela. Et je voulais te dire que j’aurais été très fière d’être ta femme, ta vraie femme, sur qui tu aurais posé ta main, le soir, en t’asseyant, sans penser, comme sur une chose bien à toi. (Elle s’est détachée de lui, elle a pris un autre ton.)Voilà. Maintenant, je vais te dire encore deux choses. Et quand je les aurais dites, il faudra que tu sortes sans me questionner. Même si elles te paraissent extraordinaires, même si elles te font de la peine. Jure-le-moi.

HEMON : Qu’est-ce que tu vas me dire encore?

ANTIGONE : Jure-moi d’abord que tu sortiras sans rien me dire. Sans même me regarder. Si tu m’aimes, jure-le-moi. (Elle le regarde avec son pauvre visage bouleversé.) Tu vois comme je te le demande, jure-le-moi, s’il te plaît, Hémon… C’est la dernière folie que tu auras à me passer.

HEMON : (après un temps). Je te le jure.

ANTIGONE : Merci. Alors, voilà. Hier. D’abord. Tu me demandais tout à l’heure pourquoi j’étais venue avec une robe d’Ismène, ce parfum et ce rouge à lèvres. J’étais bête. Je n’étais pas très sûre que tu me désires vraiment et j’avais fait tout cela pour être un peu plus comme les autres filles, pour te donner envie de moi.

HEMON : C’était pour cela?

ANTIGONE : Oui. Et tu as ri, et nous nous sommes disputés et mon mauvais caractère a été le plus fort, je me suis sauvée. (Elle ajoute plus bas.) Mais j’étais venue chez toi pour que tu me prennes hier soir, pour que je sois ta femme avant. (Il recule, il va parler, elle crie.) Tu m’as juré de ne pas me demander pourquoi. Tu m’as juré, Hémon! (Elle dit plus bas, humblement.) Je t’en supplie… (Et elle ajoute, se détournant, dure.) D’ailleurs, je vais te dire. Je voulais être ta femme quand même parce que je t’aime comme cela, moi, très fort, et que je vais te faire de la peine, ô mon chéri, pardon! que jamais, jamais, je ne pourrai t’épouser. (Il est resté muet de stupeur, elle court à la fenêtre, elle crie.) Hémon, tu me las juré! Sors. Sors tout de suite sans rien dire. Si tu parles, si tu fais un seul pas vers moi, je me jette par cette fenêtre. Je te le jure, Hémon. Je te le jure sur la tête du petit garçon que nous avons eu tous les deux en rêve, du seul petit garçon que j’aurai jamais. Pars maintenant, pars vite. Tu sauras demain. Tu sauras tout à l’heure. (Elle achève avec un tel désespoir qu’Hémon obéit et s’éloigne.) S’il te plaît, pars, Hémon. C’est tout ce que tu peux faire encore pour moi, si tu m’aimes. (Il est sorti. Elle reste sans bouger, le dos à la salle, puis elle referme la fenêtre, elle vient s’asseoir sur une petite chaise au milieu de la scène, et dit doucement, comme étrangement apaisée.) Voilà. C’est fini pour Hémon, Antigone.

  • Situation du texte

Le passage se situe juste après la soirée de bal organisée par la famille royale. Cette soirée est finie par la dispute entre Antigone et son fiancé Hémon. Ce dernier a dansé avec la belle et l'éblouissante Ismène.

  • Questions de compréhension

1- Pourquoi Antigone s'assure de l'amour d'Hémon pour ce soir de bal ?

2- Pourquoi Antigone utilise tant de répétitions du verbe "aimer" ?

3- Comment Antigone se décrit-elle par rapport à Ismène, sa sœur ?

4- Relevez une comparaison  dans les répliques d'Antigone ?

5- "j'aurais été fière d'être ta femme". Justifiez l'usage du conditionnel dans la réplique d'Antigone.

6- Antigone aime-t-elle vraiment Hémon ?

7- Que signifie la didascalie "Elle s'est détachée de lui, elle a pris un autre ton" ?

8- Que demande Antigone à Hémon de faire avant de lui dire les deux choses ?

9- Hémon finit-il par accepter la demande d'Antigone ? Comment jugez-vous le personnage d'Hémon ?

10- Pour quelle raison Antigone a-t-elle emprunté la robe et le maquillage d'Ismène ?

11-  Quel geste a fait Antigone quand Hémon décide de parler ?

12- Quelle décision importante décide de prendre Antigone dans sa relation avec Hémon ?

  • Hypothèses de lecture

_ Antigone aime Hémon.

_ Antigone met fin à son amour.

  • Axes de lecture

1_La réconciliation d’Antigone.

Grâce à sa féminité et sa jeunesse Antigone semble tendre, amoureuse et sensuelle. Elle admire Hémon en lui demandant d’oublier leur dispute : « Je te prie de me pardonner ».  Elle avait emprunté tous les accessoires de féminité et beauté d’Ismène (robe, parfum, rouge à lèvre) afin de le séduire, d’être désirable (physiquement). La jeune princesse est avide de bonheur et de vie d’amour, c’est pour cela qu’elle prie son fiancé d’être grave et de la serrer avec force. Par conséquent, elle veut s’assurer de leur amour.

2_ Antigone et la maternité

Antigone se projette dans un futur impossible. Elle rêve être une jeune femme et avoir un enfant avec Hémon. Elle emploie le conditionnel au passé :  « Le petit garçon que nous aurions eu tous les deux… », « tu aurais eu une vraie femme? », pour montrer qu’elle s’éloigne peu à peu d’Hémon. Celui-ci croit à un bonheur simple en l’épousant. Il ne sait rien de sa détermination et de son devoir. Ce qui va déclencher un malentendu entre les deux amants.

3_  La rupture du mariage

De nouveau, Antigone interroge Hémon  sur sa fidélité en lui rappelant d’autres filles et d’autres soirées. Elle se voit déçue et mal comprise. Elle se met en colère puisqu’elle ne réalisera jamais son rêve d’être une femme et de vivre comme les adultes. Bouleversée, elle crie d’un ton dramatique : « Tu m’as juré, Hémon! », «, ô mon chéri, pardon! que jamais, jamais, je ne pourrai t’épouser ». Par la suite, elle insiste par des  phrases impératives et des phrases négatives : « Sors. Sors tout de suite sans rien dire », « Pars maintenant, pars vite » sur le départ d’Hémon. Elle fait une rupture définitive de son mariage et de son bonheur.

Synthèse

La scène se termine par un coup de théâtre : la fin de la relation de fiançailles, et par conséquence de mariage, entre la princesse Antigone et le prince Hémon. C'est un événement inattendu qui va certainement introduire un changement dans la suite de l'intrigue. La fin de la relation montre qu’Antigone a décidé de mourir en se sacrifiant pour le devoir d'enterrer son frère Polynice. Hémon, aura - t- un destin tragique comme celui d’Antigone ?

 

 

Consigne :

 lisez ce cours plusieurs fois et essayez de repérer les didsacalies sur lesquelles on va travailler prochainement !

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